Nouran Gohar et Ali Farag remportent l'US Open

Gros plan : Nouran Gohar revient de loin, Ali Farag impressionnant

L'US Open s'est achevé la nuit dernière à Philadelphie, et les Égyptiens ont dominé le premier tournoi Platinum de la saison 2019-2020. Tombeuse de Camille Serme en demi-finale, Nouran Gohar est revenue de loin pour battre Nour El Tayeb, avant qu'Ali Farag ne domine son grand rival Mohamed El Shorbagy.

« Au moment où je vous parle, il n'y a personne que je déteste plus dans cette salle que Nouran Gohar ! » a plaisanté le vainqueur du tableau masculin lors de la remise des prix de l'US Open. En revenant de très loin en finale (elle était menée 2-0 et sauvé une balle de match dans le troisième jeu), elle a empêché le couple Ali Farag - Nour El Tayeb de réaliser un nouveau doublé à Philadelphie (après celui de 2017). Impressionnante face à Camille Serme la veille (voir plus loin), Gohar a néanmoins été dominée en début de match par sa compatriote, qui avait elle aussi livré une superbe prestation en demi-finale pour sortir la patronne du squash mondial, Raneem El Welily. Mais la plus jeune des deux a su trouver les solutions pour inverser la tendance et prendre le dessus en fin de partie. « Je n'arrive pas à croire que j'ai gagné, » disait-elle au micro du maître de cérémonie Gilly Lane. « Dans les deux premiers jeux, Nour était inarrêtable et j'avais l'impression de courir aux quatre coins du court. J'ai essayé de m'accrocher, je ne voulais pas que cette finale soit sans intérêt pour le public - qui a été super et m'a bien aidé en m'encourageant lorsque j'étais menée. En fin de compte, je crois que ça été un beau match n'est-ce pas ? » Grâce à cette victoire, Nouran Gohar fait coup double : elle remporte un deuxième tournoi Platinum consécutif (après le British Open en fin de saison dernière, son troisième au total) et retrouvera le 1er novembre la place de numéro 2 mondiale (qu'elle avait brièvement occupée début 2017). « J'étais très jeune à l'époque (NDLR : elle était âgée de 19 ans) et je crois que je ne me rendais pas trop compte de ce que cela représentait. » En guise de préparation pour le championnat du monde individuel, qui débute le 24 octobre, l’Égyptienne va maintenant ... passer ses examens, elle qui étudiante en génie construction. « Je suis tellement fatiguée que je ne vais pas avoir la force de réviser dans l'avion, » rigolait-elle au micro de Joey Barrington quelques minutes après son triomphe. « J'espère que mes professeurs ont regardé le match et vont être sympas avec moi ... » Il y a eu moins de suspense dans la finale masculine, même si le score des deux premiers jeux (11-4, 11-7 en faveur d'Ali Farag) ne reflète pas complètement l'intensité des échanges (14 et 17 minutes, respectivement). Impressionnant de maîtrise et de fluidité, et nullement affecté par la cruelle défaite de son épouse quelques minutes plus tôt, le numéro 1 mondial a ensuite complètement pris le dessus sur un Mohamed El Shorbagy qui a semblé fatigué : ce dernier avait non seulement été au bout à San Francisco quelques jours auparavant (tournoi sur lequel Farag avait fait l'impasse), mais également passé beaucoup plus de temps sur le court pendant la semaine à Philadelphie. « Je suis très fier de la manière dont j'ai joué aujourd'hui, » a déclaré le vainqueur. « Mohamed a démarré la saison de manière incroyable avec 12 victoires de suite, et j'en sais quelque chose car il m'avait battu en finale en Chine. Comme je l'ai dit auparavant, je ne me sens jamais aussi bien que lorsque Mike Way (NDLR : son coach à l'université d'Harvard, où il a été diplômé avant de se lancer sur le circuit) est à mes côtés. Nous avions mis une stratégie au point, et je suis ravi qu'elle ait fonctionné. » Le chemin des deux joueurs dominants du circuit ne se croisera pas au CIB Egyptian Open, car c'est au tour d'El Shorbagy de faire un break en vue du championnat du monde. Ce sera du 8 au 15 novembre au Qatar, et ils seront évidemment les principaux prétendants au titre suprême du squash. 

Ali Farag et Nouran Gohar ont remporté l'US Open, premier tournoi Platinum de la saison 2019-2020 (Crédit photo : PSA World Tour)

Comme évoqué plus haut, Camille Serme s'était lourdement inclinée en demi-finale face à Nouran Gohar (11-4, 11-6, 11-4 en 29 minutes). Elle a non seulement subi la puissance de l’Égyptienne, mais aussi commis trop de fautes directes (16 au total) lorsqu'elle s'est retrouvée en position d'attaque. « Camille n'a été que l’ombre d’elle même et n'est jamais rentrée dans le match, » n'a pas hésité à affirmer son entraîneur de toujours Philippe Signoret. « Certains parleront de syndrome Égyptien (NDLR : depuis sa dernière victoire dans un tournoi majeur, au Tournament of Champions en janvier 2017, la Française a perdu 25 de ses 29 matches face aux quatre joueuses qui composent le top 5 mondial en sa compagnie), d’autres la supériorité de son adversaire, évidente ce soir. De mon côté, je pense davantage à un problème mental. Même si Gohar, surnommée le Terminator était plutôt en mode 'exterminator', cela n’explique pas le nombre de fautes non provoquées, le manque de précision en fond de court et les problèmes de lecture de jeu. Ce match mérite une analyse plus poussée, car Camille semble avoir du mal à gérer les jeux atypiques. On se contentera d’une demi-finale de plus, mais pour être davantage qu’un rempart face aux Égyptiennes, elle devra passer un cap pour mieux appréhender certaines joueuses du circuit. La suite au Caire pour le championnat du monde, on ne lâche rien ! »

Après un beau début de tournoi, Camille Serme n'a pas trouvé les solutions face à la puissance de Nouran Gohar (Crédit photo : Steve Cubbins)

Les français sur le circuit international

Outre Camille Serme, cinq autres joueurs Français ont participé à l'US Open. Grégoire Marche a tenu son rang en atteignant les 1/8ème de finale : son parcours s'est arrêté à ce stade de la compétition face au n°4 mondial Karim Abdel Gawad, mais le résultat brut (3 jeux à 0) ne traduit pas l'intensité du match - 11-5, 16-14, 11-7 en 59 minutes. Même si l’Égyptien se rapproche du niveau qui avait fait de lui un champion du monde et numéro 1 mondial en 2016-2017, le match aurait peut-être pu prendre une autre tournure si le Français n'avait pas été victime de quelques décisions d'arbitrage défavorables, alors qu'il aurait pu égaliser à 1 jeu partout. « C'est vraiment frustrant de perdre de cette façon, » a-t-il commenté. « Je n'aime pas me plaindre des arbitres mais c'était particulier (aujourd'hui). Néanmoins, il y a eu des échanges très intenses et il y a du positif à retirer de ce match. Bravo à Karim qui a mieux joué sur la fin. » Après une solide performance au premier tour face au dangereux Youssef Ibrahim, Mathieu Castagnet s'est incliné en quatre jeux très disputés en 1/16ème de finale, face à Ryan Cuskelly. Grosse déception pour Lucas Serme, battu au premier tour par la wild card du tournoi, le jeune Américain Andrew Douglas. Défaite également en 1/32ème de finale pour Coline Aumard, passée à deux points de la victoire face à Sivasangari Subramaniam avant de s'incliner 11-9 au cinquième jeu. Enfin, Mélissa Alves continue sa progression : après avoir sorti Milou van der Heijden (29ème, soit 9 places devant elle), elle a posé des problèmes à Tesni Evans (n°9). Dommage que la Guyanaise ait raté son entame de match (« la faute à une nausée soudaine survenue pendant son échauffement, » explique Philippe Signoret) et qu'elle n'ait pu convertir plusieurs occasions dans le deuxième jeu (perdu 17-15). « Elle va devoir étoffer sa gamme de coups et gagner en précision, mais le jeu en vaut la chandelle quand on voit les soucis qu’elle peut créer à des joueuses du top 10, » conclut son entraîneur.

Les Français engagés à l'US Open ont connu des fortunes diverses (Crédits photo : Steve Cubbins)

De son côté, Edwin Clain est toujours à la recherche de sa première victoire sur le circuit cette saison, mais ça n'est pas passé loin au premier tour du Czech Open (6 000 $) : le joueur de l'US Créteil s'est incliné en 5 jeux face à l'Israélien Roee Avraham. Nul doute que la persévérance du jeune Français, qui vient de rentrer dans le top 200 mondial, ne va pas tarder à payer ...

L'actu du squash en France

--- La saison 2019-2020 des championnats de France de squash par équipe démarre samedi prochain sur les parquets de l'hexagone. Les clubs ont jusqu'à mardi pour inscrire des joueurs dans leurs effectifs, mais on peut déjà établir des pronostics. En Nationale 1, le promu Annécien et son effectif XXL font figure d'épouvantail : à un contingent d'étrangers déjà fourni (Paul Coll, Simon Rösner, Nick Matthew), le club Haut-Savoyard a ajouté Saurav Ghosal et surtout Mohamed El Shorbagy. Ils seront d'autant plus difficiles à battre si le capitaine Grégory Gaultier revient à la compétition. Leurs principaux adversaires seront des habitués : Mulhouse présente un effectif stable depuis de nombreuses années (James Willstrop, Mathieu Castagnet, Borja Golan) et s'est renforcé judicieusement avec l'arrivée de Sébastien Bonmalais, alors qu'à l'instar d'Annecy, Valenciennes compte de nombreux "top players" étrangers dans son écurie (en premier lieu Joel Makin, Declan James et le nouveau venu Fares Dessouky). Montpellier constitue une inconnue : les tenants du titre ont perdu quelques joueurs et n'ont pour l'instant aucun joueur étranger dans leur liste. Les promus de Brest (renforcés par Omar Mosaad et Mahesh Mangaonkar) pourraient en profiter pour lorgner sur la quatrième place synonyme de qualification pour les playoffs.

Si Mulhouse et Créteil (en bas à gauche) pourraient comme d'habitude dominer les Interclubs féminins, l'arrivée d'Annecy (en haut à gauche en compagnie des autres promus de Brest) en Nationale 1 va redistribuer les cartes chez les hommes (Crédits photo : Nicolas Barbeau)

Assistera-t-on à un énième duel Mulhouse - Créteil chez les femmes ? Les Franciliennes ont perdu Tinne Gilis (partie en N2 à Annecy) et Laura Gamblin, mais leur trio estampillé équipe de France (Camille Serme - Mélissa Alves - Énora Villard) a fière allure. L'effectif des Alsaciennes, mélange de jeunesse et d'expérience (d'Ambre Allinckx à Sarah-Jane Perry) a été bonifié avec le recrutement de Tesni Evans. Pour contrecarrer les plans des deux favoris, on pense à Bourges (abonné à la médaille de bronze) et Valence, qui s'est bien renforcé avec les Égyptiennes Nadine Shahin et Jana Shiha, et l'Anglaise Kace Bartley. On vous rappelle le règlement : lors d'une rencontre, une équipe est composée de 4 joueurs (3 joueuses chez les femmes). Elle doit comporter au minimum 2 joueurs Français (une Française chez les femmes), et au maximum 1 non ressortissant d’un pays membre de l’Union Européenne.

En bref ...

--- Les jeunes joueurs Français ont-ils été inspirés par leurs aînés, qui ont cartonné sur le circuit international ces derniers semaines ? À l'occasion du premier tournoi junior européen de la saison 2019-2020, la délégation Tricolore a ramené pas moins de quatre médailles du Nordic Junior Open en Suède, dont trois en or ! Axel Diet avait montré la voie en s'imposant face au Hongrois Barnabás Sáli (3-0) en finale des -13 ans. Pour son dernier tournoi dans la catégorie (il aura 13 ans le 1er novembre), le joueur de Royan décroche son premier titre sur le circuit continental après de nombreuses places d'honneur. Il a ensuite été imité par Paul Gonzalez en -17 ans. Le Marseillais a tenu son rang de tête de série n°1, dominant le Néerlandais Rowan Damming en finale (3 jeux à 1). Il s'est offert un beau cadeau d'anniversaire en avance (il a eu 17 ans hier), avec cette première victoire en tournoi européen avant de passer en -19. Battu par Paul en demi-finale, son coéquipier en équipe de France Baptiste Bouin complète le podium (et obtient quant à lui sa première médaille). Comme Paul Gonzalez, Ninon Lemarchand s'entraîne au pôle espoirs d'Aix-en-Provence et défend depuis la rentrée les couleurs d'Annecy. Les similitudes ne s'arrêtent pas là, car elle s'est également imposée en -17 ans ! Devant une adversaire qui évoluait à domicile en finale (Moa Bonnemark, tombeuse de Mahé Asensi en demi), la jeune Française l'a emporté sur le fil, 3 jeux à 2. C'est son quatrième succès sur le circuit du squash européen, et le premier depuis l'automne 2017. En plus de ces quatre médailles, cinq autres jeunes Français ont fini dans le top 5 de leur catégorie en Suède : Léa Barbeau (5ème en -19 ans filles), Mahé Asensi et Ana Munos (4ème et 5ème en -17 ans filles), Laszlo Godde (5ème en -17 ans garçons) et Romeo Bily (5ème en -15 ans garçons). La plupart de ces jeunes seront en Belgique (31 octobre-3 novembre) pour le prochain tournoi européen (liste complète des engagés dans l'Agenda). Avec la même réussite ? Réponse dans quelques semaines ...

Grâce à Paul Gonzalez, Ninon Lemarchand et Axel Diet, la délégation Tricolore a ramené trois titres du Nordic Junior Open (Crédits photo : Nordic Junior Squash Open & Christophe Lemarchand)

Les rendez-vous squash des deux prochaines semaines

--- Le championnat du monde féminin individuel 2019-2020 se déroule du 24 octobre au 1er novembre au pied des Pyramides de Giza. Grâce au soutien du sponsor principal CIB, le prize money global sera de 430 000 $ (deuxième plus important de l'histoire après l'édition 2018-2019 à Chicago). Voici ce qui attend les quatre Françaises en lice : ️tête de série n°3, Camille Serme affronte l’Égyptienne Salma Youssef (66ème mondiale) au premier tour. Son parcours théorique lui proposera ensuite l'Anglaise Millie Tomlinson (22ème), l’Égyptienne Yathreb Adel (16ème), puis l'Américaine Amanda Sobhy (8ème) - qu'elle a battue deux fois cette saison. Si elle franchit cette marche, elle devrait retrouver en demi-finale la tenante du titre Nour El Sherbini, qui effectuera son retour après une blessure au genou et a sur son chemin Joelle King en quart de finale. Dans le haut du tableau, les quarts de finale théoriques sont Nouran Gohar - Sarah-Jane Perry et le choc entre les numéros 1 et 3 mondiales, Raneem El Welily et Nour El Tayeb. Tête de série n°32, Coline Aumard (37ème) est opposée à la Canadienne Danielle Letourneau (3ème) en 1/32è de finale. La gagnante de ce match se mesurera probablement à la Galloise Tesni Evans (n°9). Tirage difficile pour Mélissa Alves (38ème), opposée dès l'ouverture à El Tayeb (les deux joueuses s'étaient déjà affrontées lors de l'édition précédente, mais en 1/8ème de finale). Jamais 2 sans 3 pour Énora Villard (52ème) ? Après avoir battu Tinne Gilis (26ème) au championnat d'Europe individuel puis à l'open de France, elle affronte à nouveau la jeune Belge. La gagnante devrait être opposée ensuite à l'Anglaise Victoria Lust (14ème). Dans le même temps, trois joueurs Français disputeront le CIB Egyptian Squash Open 2019 (tournoi Platinum) : Lucas Serme (37ème) affronte Omar Abdel Meguid (66ème) avec la perspective de retrouver Paul Coll (5ème) en 1/16è de finale. Le Néo-Zélandais est également l'adversaire théorique de Grégoire Marche (16ème) en 1/8ème, à condition que le n°1 français (exempté de premier tour) batte Mohamed El Sherbini (51ème) ou Iker Pajares (38ème) au tour précédent. Enfin, c'est un petit évènement pour Baptiste Masotti (59ème), qui participera à son premier tournoi majeur (hors championnat du monde). Le Niortais sera opposé à l'Espagnol Borja Golan (34ème) au premier tour. Tous les joueurs du top 10 seront présents, à l'exception de Mohamed El Shorbagy, qui a décidé de se reposer en vue du championnat du monde (8-15 novembre au Qatar) après un début de saison chargé (déjà trois finales disputées). Les quarts de finale théoriques sont les suivants : Ali Farag - Mohamed Abouelghar (de retour de blessure), Paul Coll - Simon Rösner (qui affronte néanmoins Fares Dessouky dès les 1/16ème de finale), un possible remake de l'US Open Karim Abdel Gawad - Diego Elias si ce dernier bat Marwan El Shorbagy au tour précédent, et Miguel Angel Rodriguez - Tarek Momen (opposé à Joel Makin en 1/16ème).

C'est dans le cadre somptueux des pyramides de Giza que va avoir lieu le championnat du monde féminin dans quelques jours (Crédit photo : PSA World Tour)

En attendant, d'autres Français sont sur le circuit ces prochains jours, et même dès aujourd'hui en Inde (12 000 $) : en cas de victoire face à l’Égyptien Omar El Kattan, Benjamin Aubert défiera le numéro 2 du pays hôte, Mahesh Mangaonkar, alors que Fanny Segers affronte la jeune Malaisienne Rusydina Rosli. En Angleterre (20 000 $), Sébastien Bonmalais affronte Amaad Fareed ou Valentin Rapp en 1/8è de finale mercredi. Victor Crouin et Auguste Dussourd entrent en lice jeudi à Cleveland (20 000 $), où ils sont têtes de série 3 et 4. La semaine suivante, Fabien Verseille aura un premier tour à sa portée face au Portugais Claudio Pinto en Suisse (12 000 $), et retrouvera l'Espagnol Carlos Cornes en 1/8è de finale en cas de succès. Enfin, Marie Stéphan commencera sa campagne à Ottawa (12 000 $) le 31 octobre, face à l'adversaire de Camille Serme au premier tour du championnat du monde (Salma Youssef). 

Prochain rendez-vous pour l'actu squash le samedi 2 novembre, avec un focus sur le championnat du monde féminin.