Grasshopper Cup : Ramy Ashour impérial

Gros plan : Le récital de l'artiste

Ramy Ashour est-il de retour ? Seul l'avenir le dira, mais l'ancien numéro 1 mondial et champion du monde a délivré une partition proche de la perfection la semaine dernière à Zurich, ponctuant son chef d'œuvre par une victoire contre l'homme en forme du moment, Mohamed El Shorbagy.

Ramy Ashour a inauguré une nouvelle manière de célébrer ses victoires en Suisse, en faisant la révérence au public de Zurich (Crédit photo : SquashSite / Steve Cubbins) 

Ramy Ashour, considéré par de nombreux observateurs comme le joueur le plus talentueux de l'histoire du squash, est martyrisé par les blessures depuis tant d'années qu'on en oublierait presque quand cette série noire a commencé ... Pendant cette période, il a réalisé plusieurs come-backs victorieux, aussi extraordinaires qu'éphémères. L'expérience incite donc à la prudence quant à un possible retour à son meilleur niveau, mais les signes entrevus à la Grasshopper Cup sont très positifs pour le triple champion du monde. « On ne l'a pas vu se déplacer aussi bien sur le court depuis très longtemps, sans doute depuis sa victoire à El Gouna en 2015, » affirmait Joey Barrington, commentateur emblématique de la chaîne Squash TV. De plus, l'Égyptien a semblé prendre du plaisir sur le court, et n'a également pas hésité à plonger à plusieurs reprises, signes que son esprit n'était pas parasité par d'éventuels pépins physiques. En l'espace de trois jours, Ashour a imposé son jeu, tout en finesse et variations, face à trois joueurs majeurs du circuit : Simon Rösner, Grégory Gaultier (lui aussi peu épargné par les blessures ces derniers temps, voir plus loin), et surtout Mohamed El Shorbagy en finale. La réaction de ses victimes a été à peu de choses près identique : « Ramy a été plus fort aujourd'hui, mais ça fait plaisir de le revoir à ce niveau, car le circuit a besoin de lui. » « Jouer contre Ramy, c'est quelque chose de spécial, » a ajouté El Shorbagy après la finale, remportée par Ashour 3 jeux à 0. « D'ailleurs, après un énorme échange, je me suis arrêté pour lui dire que ça me manquait ... J'ai le sentiment que lorsqu'on s'affronte, on amène le squash dans une autre dimension. » Le numéro 1 mondial fait référence à une deuxième manche où le niveau de jeu a atteint des sommets. Fatigué par l'enchaînement des matches depuis quelques semaines (victorieux à Chicago puis à Canary Wharf), El Shorbagy n'a pas pu rivaliser avec son compatriote par la suite, mais il ne voit « aucune honte à être battu par l'un des plus grands joueurs de tous les temps. J'espère qu'il va rester en bonne santé pour qu'on ait la chance de s'affronter à nouveau. » 

Les interviews de Ramy Ashour sont presque aussi fascinantes que ses matches. Avec son débit mitraillette mais un Anglais toujours parfait, l'Égyptien s'est longuement confié après sa victoire. « Je ressens énormément d'émotions. Ces dernières années ont été vraiment compliquées, mais mon moteur est de me prouver à moi-même que j'ai encore le niveau pour être au top. J'y pense tout le temps : quand je me lève le matin, quand je m'entraîne ou pendant un rendez-vous avec une fille (rires) ! J'aimerais pouvoir dire que je vais jouer au squash toute ma vie, même si je sais que ce n'est pas possible. Mais je continuerai aussi longtemps que je le pourrai, et toutes les personnes impliquées dans ce sport - joueurs, arbitres, spectateurs, organisateurs, médias etc. - doivent se rendre compte à quel point il est formidable. Surtout quand on a la chance de jouer devant un public aussi fabuleux. Je suis évidemment ravi de la manière dont j'ai joué aujourd'hui, contre un joueur qui est un athlète extraordinaire et a eu des résultats incroyables ces derniers temps. Mais Mohamed est également un grand sportif, et il l'a prouvé en annonçant sa balle faute sur un point très important (10-9 dans le deuxième jeu, alors que l'arbitre ne l'avait semble-t-il pas vu). J'ai gagné, je suis content mais sans vouloir paraître arrogant, je ne suis pas surpris : j'ai traversé beaucoup d'épreuves, mais j'ai énormément travaillé et je crois donc que je mérite ce qui m'arrive ! » L'ironie de l'histoire, c'est qu'alors qu'ils semble être enfin à 100 %, Ashour ne participera pas à l'open d'El Gouna dans son pays (20-27 avril). Information à prendre au conditionnel, mais l'actuel numéro 10 mondial aurait oublié de s'inscrire !

Après quelques semaines d'absence, Grégory Gaultier est revenu sur le devant de la scène à Zurich (Crédit photo : SquashSite / Steve Cubbins) 

En revanche, Grégory Gaultier sera bien présent en Égypte. « J'ai maintenant quatre semaines pour bien préparer ce tournoi, » a déclaré le Français après sa défaite en demi-finale contre Ashour (alors que ses compatriotes Mathieu Castagnet et Grégoire Marche avaient été éliminés en qualifications). Auteur d'une remontée extraordinaire en quart contre Mohamed Abouelghar, Gaultier était néanmoins satisfait de son retour après sa déchirure à l'adducteur. « J'ai encore quelques douleurs mais la jambe a tenu, et j'ai vraiment apprécié de reprendre la compétition. J'étais venu ici sans aucune attente, et je suis ravi de la manière dont j'ai joué. Quand on est éloigné des courts ça peut être déprimant, mais Ramy est justement une source d'inspiration. Malgré ses blessures, il ne s'est jamais découragé et a toujours tout fait pour revenir. Je vais donc moi aussi tout mettre en œuvre pour revenir à mon meilleur niveau, même si cela prendra sûrement un peu de temps. »

Les autres news de la semaine du squash

--- Le club du Visa Form et l'association Seynod Annecy Squash accueillaient la semaine dernière le deuxième Annecy PSA Open, avec un prize money en hausse (10 000 $). Le tournoi avait commencé par un coup de tonnerre, avec la défaite d'entrée du favori Richie Fallows, contre Benjamin Aubert (vainqueur du 5 000 $ en 2017). Une nouvelle fois victime de pépins physiques, le jeune Français n'a néanmoins pas pu enchaîner en quart de finale contre un autre Anglais Patrick Rooney. De manière générale, les joueurs Français ont « loupé une belle opportunité, » estime l'entraîneur national Renan Lavigne, « car le tableau était très ouvert. » À l'image de Baptiste Masotti, pas en mesure d'enchaîner après une superbe tournée Canadienne et battu dès le premier tour. De son côté, Victor Crouin était passé à trois points de la victoire en quart de finale contre Mohamed El Sherbini, produisant un « squash très qualitatif. » dixit Lavigne. « Il lui a juste manqué un poil de lucidité dans les moments cruciaux. » L'Égyptien allait ensuite faire tomber le seul Français présent dans le dernier carré, Auguste Dussourd. Malade, le joueur de l'US Créteil était dominé dans les deux premiers jeux, avant de faire preuve d'une belle combativité pour revenir dans le match mais de s'incliner 12-10 dans le cinquième jeu ... Le nombreux public a d'ailleurs été gâté puisque l'autre demi-finale a également été un marathon, remporté par Rooney face à l'Espagnol Jaume après 1h20 de jeu. Rebelote le lendemain, avec une finale où l'Anglais et El Sherbini se sont rendus coup pour coup. C'est finalement ce dernier qui s'impose 3 jeux à 2, prolongeant ainsi sa série de victoires en finale - 6 sur 6 - depuis qu'il a effectué ses véritables débuts sur le circuit international, il y a un an (il est âgé de 25 ans).

Mohamed El Sherbini s'est imposé à Annecy, un tournoi qui aurait pu tomber dans l'escarcelle d'un Français selon Renan Lavigne (Crédits photo : Draz Foto)

--- Tour d'horizon des autres tournois PSA : la semaine dernière, elle avait remporté son premier titre depuis deux ans. La jeune l'Égyptienne Mayar Hany a enchaîné en décrochant un nouveau 15 000 $ à Regina (Canada). En finale, elle a battu sa compatriote Nada Abbas. La Française Énora Villard avait atteint les quarts, avant de s'incliner logiquement contre la tête de série n°1 (Nadine Shahin). --- Toujours au Canada mais chez les hommes, Nafiizwan Adnan s'était incliné en finale il y a quelques jours à Montréal, mais le Malaisien a inversé le sort en s'imposant à Manitoba (15 000 $) contre le Néo-Zélandais Campbell Grayson. --- Comme Hany, Carlos Cornes a décroché son deuxième titre consécutif, cette fois-ci en Australie (5 000 $). ---- Autre Espagnol victorieux, Edmon Lopez, qui s'impose en Suède (5 000 $) sans perdre un jeu. --- Aifa Azman ne s'arrête plus de gagner. Après son succès au British Junior Open en -17 ans début janvier, la jeune Malaisienne a remporté dans son pays son quatrième tournoi 5 000 $ en quelques semaines. C'est l'Égyptien Shehab Essam qui s'est imposé chez les hommes, aux dépens d'un revenant, le fantasque Asyraf Azan.

--- Le club SquashBad33 accueillait le week-end dernier les championnats de France -13/-17 ans à Gradignan (Bordeaux). Toufik Mekhalfi (-17 garçons) a tenu son rang de favori, en ne perdant aucun jeu. Notamment en finale contre son habituel rival Manuel Paquemar. « J'étais un peu fatigué de mes matches précédents (avec notamment deux victoires en cinq jeux), mais Toufik était de toute façon beaucoup plus fort, bravo à lui, » a concédé le Breton. Après deux succès en -15 ans, c'est le troisième titre national pour le pensionnaire du pôle espoirs d'Aix-en-Provence. Déjà médaillé de bronze en -19 ans, il a d'ailleurs été sélectionné pour le championnat d'Europe de cette catégorie (voir Les rendez-vous squash de la semaine). Chez les filles, Cléo Jahard a causé la surprise en battant la tenante du titre Yuna Loaec, 11-8 dans le cinquième jeu. Seulement première année dans cette catégorie, la joueuse de Vincennes remporte son deuxième championnat de France. C'est en revanche une première pour Melvil Scianimanico (-13 ans garçons). Battu en finale par Antonin Romieu il y a deux ans en -11, le Parisien a pris sa revanche, mettant ainsi fin à la belle série du Corse (trois titres de champion de France depuis 2015, dont les -13 en 2017). De son côté, la Niortaise Rose Lucas-Marcuzzo, déjà sacrée en -11 ans, a confirmé sa suprématie dans sa catégorie d'âge, venant à bout d'Inès Guyot en quatre jeux disputés.

Les podiums des championnats de France -13/-17 à Bordeaux (Crédits photo : Pierre Bernard)

Les rendez-vous squash de la semaine

--- Plusieurs Français disputent un tournoi de squash sur le circuit international cette semaine. À Wimbledon (35 000 $), Mathieu Castagnet aura l'occasion de prendre sa revanche contre Ben Coleman, qui l'a récemment battu au Canary Wharf, alors que Lucas Serme affronte un qualifié au premier tour. Les têtes d'affiche du tournoi sont James Willstrop et Daryl Selby. De son côté, Sébastien Bonmalais et Enzo Corigliano participent à un 15 000 $ au Nigeria, qui accueille pour la première fois un tournoi du circuit masculin. Le tirage n'a pas été clément avec le Réunionnais, opposé à la tête de série n°1 (Karim Ali Fathi) dès le premier tour, alors que le Néo-Calédonien doit en passer par les qualifications. Le globe-trotter Vincent Droesbeke sera à Moscou (5 000 $), où il sera opposé au Croate Martin Kegel, alors que chez les filles, Chloé Mesic, Élise Romba et Cyrielle Peltier (dont ce sera le premier tournoi en PSA depuis septembre !) seront en Angleterre à partir de jeudi. Leurs adversaires au premier tour ? Une qualifié et Grace Gear, respectivement. Enfin, on suivra avec attention le parcours de l'Américaine Amanda Sobhy à Houston. L'ancienne numéro 6 mondiale a été impressionnante depuis son retour de blessure à la mi-janvier.

Battu deux fois par Ben Coleman cette saison (dont ici à Nantes), Mathieu sera revanchard demain à Wimbledon (Crédit photo : Lauranne Rochais)

Le championnat d'Europe junior individuel de squash démarre samedi en Pologne. Vainqueur l'an dernier, Victor Crouin est grand favori pour conserver son titre, et rejoindre le seul à avoir accompli cet exploit, un certain Grégory Gaultier (lauréat en 2000 et 2001). Ses principaux challengers seront Anglais (Nick Wall, Tom Walsh), Suisse (Yannick Wilhelmi) ou encore Tchèques (Viktor Byrtus, Ondrej Vorlicek), tous des joueurs que le Toulonnais a battu assez facilement ces derniers temps. Dans le sillage de son leader, Edwin Clain tentera de faire respecter son rang (tête de série 7/8), auquel cas il jouerait Tom Walsh en quarts. Les deux autres Tricolores, Adrien Douillard et le champion de France -17 ans Toufik Mekhalfi sont TS 13/16. Chez les filles, Maëlle Fuhrer, Fanny Segers et Yuna Loaec (16 ans, comme Mekhalfi) auront fort à faire pour se distinguer, dans un tableau qui devrait être dominé par les Britanniques. Notamment les Anglaises Elise Lazarus et Lucy Turmel, deuxième et troisième en 2017.

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